Dans quelles mesures une entreprise peut-elle procéder à un licenciement économique ?
Un licenciement pour motif économique, à la différence d’un licenciement pour motif personnel, ne résulte pas d’un motif inhérent à la personne du salarié. Il doit être motivé par des raisons économiques qui trouvent leurs origines :
- Soit dans la suppression ou la transformation de l’emploi du salarié concerné ;
- Soit dans la modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail.
Les raisons économiques, avancées par l’employeur, ne sont recevables que si elles sont justifiées par :
- Des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique (baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, pertes d’exploitation, dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation), soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés ;
- Des mutations technologiques (par exemple, introduction dans l’entreprise d’une technologie informatique nouvelle comportant une incidence sur l’emploi) ;
- La nécessité pour l’entreprise de se réorganiser pour tenter de rester compétitive ou prévenir des difficultés économiques.
- La cessation d’activité de l’entreprise (sauf si elle est due à une faute de l’employeur).
Le licenciement économique peut concerner une ou plusieurs personnes : on parlera alors de licenciement économique individuel ou de licenciement économique collectif.
Comment se déroule un licenciement économique ?
L’employeur qui entend procéder au licenciement de salariés pour des raisons économiques doit respecter une procédure stricte qui dépend, avant tout, du nombre de salariés concernés par le licenciement.
En l’absence de convention ou d’accord collectif de travail applicable à sa situation, et pour le cas où il n’envisage pas la fermeture définitive de ses locaux, l’employeur commence par définir les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, le cas échéant après consultation du comité social et économique (CSE).
Au visa de l’article L 1233-5 du Code du travail, ces critères doivent notamment prendre en compte :
- Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;
- L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;
- La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
- Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.
Si l’employeur a l’obligation de prendre en considération l’ensemble de ces critères, il peut en privilégier certains et en ajouter d’autres en les pondérant. Le salarié dispose d’un délai de 10 jours à compter de son départ pour demander les critères d’ordre retenus par l’employeur et de 12 mois pour contester l’inobservation des critères d’ordre du licenciement (Cass. soc. 16 déc. 2020 P n° 19-18.322).
Procédure de licenciement économique individuel
L’employeur qui envisage le licenciement d’un seul salarié pour raison économique est tenu de le convoquer à un entretien préalable de licenciement (par courrier recommandé avec avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge). Cette convocation doit être remise au moins cinq jours ouvrables avant la date de l’entretien et doit préciser :
- L’objet de l’entretien ;
- La date, l’heure et le lien de l’entretien ;
- La possibilité de se faire assister par la personne de son choix appartenant à l’entreprise ou, en l’absence de représentant du personnel, par un représentant extérieur.
Pendant cet entretien, l’employeur doit expliquer au salarié les motifs qui le poussent à le licencier ; lui faire des propositions de reclassement sur des postes équivalents ou inférieurs (que le salarié n’est pas tenu d’accepter) ; lui proposer des formations dans le cadre de son compte personnel de formation. Il doit également l’informer de la possibilité de bénéficier :
- D’un contrat de sécurisation professionnelle si l’entreprise compte moins de 1 000 salariés et que le salarié bénéficie d’au moins deux ans d’ancienneté. Si l’employé l’accepte, il bénéficiera d’un accompagnement dans sa recherche d’emploi et d’une allocation ;
- D’un congé de reclassement, si l’entreprise compte plus de 1 000 salariés. Si l’accepte, le salarié bénéficiera d’un congé de formation de 4 à 9 mois et d’un accompagnement dans sa recherche d’emploi. Il continuera également à percevoir une partie de son salaire.
L’employeur a par la suite l’obligation de notifier au salarié son licenciement par lettre recommandée avec avis de réception, après un délai minimum de 7 jours ouvrables suivant l’entretien (15 jours pour un cadre). Cette dernière doit indiquer précisément le(s) motif(s) du licenciement ; préciser au salarié qu’il bénéficie, pendant un an, s’il le souhaite, d’une priorité de réembauchage : lui faire part des mesures prises pour un maintien dans l’entreprise ; lui mentionner les délais dont il dispose pour accepter ou refuser les propositions de reclassement et pour contester son licenciement.
Dans les 8 jours qui suivent l’envoi de la lettre de licenciement au salarié, l’employeur informe la direction générale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarité (DREETS) de la situation.
Sauf exceptions, le contrat du salarié prend fin au terme du préavis de licenciement qui est d’un mois si le salarié a entre 6 mois et 2 ans d’ancienneté, et de 2 mois s’il est dans l’entreprise depuis 2 ans ou plus.
Procédure de licenciement économique collective
La procédure de licenciement économique collective est sensiblement la même, pour chaque salarié, que la procédure de licenciement économique individuelle. Toutefois, si plusieurs salariés sont concernés sur une même période 30 jours, une nouvelle étape s’ajoute :
- Lorsque deux à neuf salariés sont concernés, l’employeur doit commencer par consulter et réunir les représentants du personnel ou le comité social et économique pour expliquer le projet de licenciement, recueillir les avis et répondre aux questions. Si l’entreprise compte plus de 50 salariés, la convocation à cette réunion doit en outre être accompagnée de tous les renseignements utiles.
- Lorsque plus de dix salariés sont concernés et que l’entreprise compte moins de cinquante salariés, l’employeur doit commencer par consulter les représentants du personnel ou le Comité social et économique pour expliquer le projet de licenciement collectif, recueillir les avis et répondre aux questions. Le CSE doit ALORS tenir obligatoirement 2 réunions séparées par un délai maximum de 14 jours.
- Lorsque plus de dix salariés sont concernés et que l’entreprise compte plus de cinquante salariés, l’employeur doit mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi en consultant le Comité social et économique. La lettre de licenciement ne pourra alors être adressée aux salariés concernés qu’après validation du plan de sauvegarde de l’emploi, ou après que les délais prévus pour que les autorités administratives se prononcent sur le plan aient été dépassés.
Comment sont calculées les indemnités lors d’un licenciement économique ?
Un salarié en contrat à durée indéterminée (CDI) licencié pour motif économique bénéficie d’une indemnité.
Si aucune convention collective ou contrat de travail ne prévoit une indemnité plus avantageuse, c’est le montant de l’indemnité légale qui s’applique. Cette indemnité légale varie en fonction de l’ancienneté du salarié :
- Si le salarié a moins de dix ans d’ancienneté, elle doit être supérieure ou égale à un quart de mois de salaire brut par année d’ancienneté.
- Si le salarié a plus de dix ans d’ancienneté, elle doit être supérieure ou égale à un quart de mois de salaire brut pour les dix premières années et à un tiers de mois de salaire brut pour les années d’ancienneté suivantes.
Sont également versées :
- Une indemnité compensatrice de congés payés ;
- Une indemnité compensatrice de préavis ;
- L’indemnité éventuellement prévue par le plan de sauvegarde de l’emploi ou le plan de départ volontaire ;
- Une indemnité supplémentaire, si la procédure de licenciement n’a pas été respectée.
Peut-on contester un licenciement économique et dans quels délais ?
Un salarié qui fait l’objet d’un licenciement économique peut contester son licenciement pour non-respect de la procédure de licenciement, pour absence de motif économique ou pour non-respect des critères d’ordre du licenciement en saisissant le conseil des prud’hommes dans le délai d’un an à compter de l’adhésion au CSP ou de la réception de la lettre de licenciement (ou, s’agissant des salariés protégés devant le tribunal administratif dans le délai de 2 mois qui suivent l’autorisation de licenciement). L’insuffisance de plan de sauvegarde pour l’emploi devra être contesté devant le Tribunal administratif dans le délai de deux mois. A ce stade, le recours aux conseils d’un avocat en droit du travail est précieux.