Management par la peur : comment lutter contre ce fléau ?

Management par la peur

Le management de la peur, aussi dénommé management par la terreur, a été mis en lumière dans les années 2000 suite à une vague de suicides, directement liée aux méthodes de management mises en place dans l’entreprise, chez les salariés de France Télécom. Aujourd’hui encore, de nombreux employés subissent ces procédés brutaux et se rendent au travail avec la boule au ventre. 

Pour autant, de tels agissements contreviennent à l’obligation de sécurité qui lie l’employeur à ses salariés. Dans le cadre de l’exécution des contrats de travail au sein de son entreprise, l’employeur est en effet tenu d’assurer la santé mentale et physique de ses salariés. A défaut, il engage sa responsabilité et s’expose à de lourdes sanctions. 

En quoi consiste le management par la peur ?

Le management par la peur est une méthode de gestion qui consiste à imposer aux salariés une importante pression dans le but d’augmenter leurs résultats et leur productivité. L’entreprise se positionne alors en situation de toute-puissance grâce à une hiérarchie fortement marquée. Cela lui permet d’obtenir l’obéissance totale et de rendre impossible l’expression des désaccords des collaborateurs. Les salariés deviennent vulnérables et développent des craintes (peur de ne pas être au niveau, peur des remontrances, de la sanction, de perdre son travail, etc.).

Pour parvenir à ses fins, l’entreprise qui recourt au management par la peur va utiliser différentes méthodes de harcèlement organisationnel, telles que :

  • Le management par le stress : le salarié est soumis à un stress constant et à une surcharge de travail. Il se voit imposer des objectifs toujours plus grands, est souvent mis en compétition avec ses collègues et, au quotidien, craint son manager. L’entreprise est focalisée sur la performance et utilise des techniques d’hyper surveillance pour s’assurer de sa productivité.
  • La déstabilisation : le salarié est poussé vers la sortie. L’entreprise utilise tous les moyens à sa disposition pour le déstabiliser et rendre ses conditions de travail incertaines ou dégradantes : mobilité géographique forcée, modification de poste à répétition, etc. Et, si d’aventure, le salarié tente de résister, son employeur lui fait craindre une mise au placard, se débrouille pour l’isoler de ses collègues ou lui « propose » une retraite forcée. 
  • La pression psychologique et le harcèlement moral : le salarié subit une absence de considération et de respect, des humiliations, un contrôle quotidien, la menace de sanctions ou encore des remontrances injustifiées de la part de son responsable ou du chef d’entreprise. Il connait une véritable situation de souffrance au travail. 

La mise en place d’un management par la peur nuit également à l’ambiance générale de l’entreprise et à la cohésion de ses équipes.  Sous la pression, chacun se replie sur lui-même et l’entraide entre collègues disparait peu à peu. A plus ou moins long terme, le climat qui existe sur lieu de travail se tend et l’ambiance y devient délétère. 

Management par la peur : quel impact sur les salariés et sur l’entreprise ?

Par la peur qu’elle instaure et la situation de stress au travail qu’elle génère, la brutalité de ces méthodes de management exposent les salariés à des risques pour leur santé mentale et physique.

A court terme, leurs conditions de santé se dégradent. Biens souvent, ils souffrent d’hyper stress, d’insomnies, de mal être, d’une perte de confiance de plus en plus établie et, dans les cas les plus graves, de risques psychosociaux importants comme le burnout, la dépression, voire le suicide… 

Cette situation peut également conduire au déclenchement d’un eczéma ou se traduire par une irritabilité à fleur de peau. Pour les personnes addictes à l’alcool, la tentation de boire davantage est plus forte, certains se vengent sur la nourriture (crise de boulimie), d’autres au contraire, ne s’alimentent plus (anorexie).

La vie privée des salariés victimes de type de management est, de même, souvent affectée. Parce qu’ils ne parviennent pas à décrocher de leur travail, à prendre du recul, leur vie familiale se détériore (difficultés de communication, sentiment d’être incompris, renfermement sur soi-même, désintérêts pour les enfants, séparation, divorce, etc.).

Il est à noter, par ailleurs, que le management par la peur est tout aussi dangereux pour l’entreprise.  En ne faisant bénéficier aux salariés d’aucune liberté d’organisation, l’entreprise se prive de leur créativité et de leur esprit d’initiative. Sur le long terme, cette atmosphère de terreur aura un effet contre-productif, puisqu’elle entraînera un désengagement, une baisse de motivation, une multiplication des arrêts-maladies et un très fort turn-over au sein des équipes.  

Comment lutter contre le management par la peur ?

La voie légale 

Selon l’article L 4121-1 du Code du Travail, l’employeur se doit de mettre en place « les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ».

Ainsi, il est dans l’obligation de prévenir l’existence de risques professionnels et doit mettre en œuvre des actions adaptées pour les prévenir. Et s’il est informé d’une situation caractérisant un risque pour la sécurité, il est tenu d’y mettre un terme et de s’assurer qu’elle ne se reproduira pas. 

Dans ce contexte, la Cour de cassation admet que des méthodes de management dures, comme le management par la peur, peuvent caractériser un manquement de l’employeur à son obligation de prévention des risques professionnels. C’est le cas par exemple lorsque le management par la terreur a des répercussions sur la santé du salarié, génère une souffrance au travail, dégrade ses conditions de travail.

Peu importe alors que les agissements relèvent ou non de la définition du harcèlement moral. Les deux qualifications pourront d’ailleurs être retenues et les sanctions se cumuler.

Le mangement par la peur engage donc la responsabilité de l’employeur, justifiant que le salarié qui en est victime prenne acte de la rupture de son contrat de travail et obtienne des dommages et intérêts. La preuve des faits est indispensable. Des sanctions plus lourdes (et notamment pénale) peuvent également être retenues contre l’employeur. 

La voie psychologique 

Dans le cadre de la constitution d’un dossier en vue de saisir la justice, il pourra être utile de prévenir le Comité social et économique (CSE) de son entreprise. Le salarié pourra utilement saisir le médecin du travail des difficultés rencontrées qui affectent sa santé et qui compromettent son avenir professionnel. 

Contrairement à une idée répandue, le salarié ne pourra sortir de cette situation toxique en gardant pour lui les difficultés qu’il rencontre ou en « faisant le dos rond » ou « dans l’attente que cela passe ».

Même si le plus souvent lorsque le salarié remet en cause ce type de management les reproches peuvent pleuvoir et / ou conduire à la mise en œuvre d’un licenciement pour divers motifs, insuffisance professionnelle ou insubordination, il est aussi fréquent que l’employeur fasse cesser les comportements qu’il a pu cautionner ou laisser perdurer. 

Dans tous les cas, le fait de refuser de subir ces agissements ne pourra être valablement retenu contre le salarié. Au contraire, si un licenciement intervient et que le lien entre le refus de subir les agissements fautifs et le motif de la rupture est établie, le salarié pourra se prévaloir de la nullité de son licenciement. 

A ce stade, l’intervention d’un avocat en droit du travail est des plus indispensable afin de définir une stratégie adaptée et des correspondances destinées à préserver les droits du salarié.

Parallèlement, la victime d’une situation de management par la peur, a tout intérêt à confier sa souffrance au travail à ses proches, à son médecin ou à un psychologue. Il est en effet important de ne pas se refermer sur soi pour être capable de retrouver la confiance perdue et pouvoir avancer. Un coaching ou la réalisation d’un bilan de compétences peuvent également aider à rebondir. 

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