La perte de confiance est-elle un motif valable de licenciement ?

Non à elle seule, selon la Cour de cassation car un licenciement ne peut être fondé que sur des éléments objectifs, qui doivent pouvoir être matériellement vérifiables et figurer dans la lettre de licenciement selon le code du travail. La perte de confiance est un motif trop subjectif pour être légitime selon la Cour de cassation. C’est pourquoi il est déconseillé aux employeurs d’invoquer ce motif dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige. Il convient de mentionner un motif précis qui peut être à l’origine de la perte de confiance et être en mesure de prouver une faute du salarié, ou une insuffisance professionnelle qui à elle seule serait la cause de licenciement.

Les motifs personnels valables de licenciement

Il existe plusieurs grands types de licenciement : pour faute, sans faute, pour motif personnel ou pour motif économique. Ceux d’ordre personnel ou comportementaux reposent sur la personne du salarié : pour être valable, le licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. C’est-à-dire qu’il doit reposer sur des faits objectifs, vérifiables et non sur une impression ou un jugement subjectif comme cela pourrait être le cas pour la perte de confiance, ou encore la mésentente ou encore la divergence de vues. Il doit aussi être suffisamment grave pour enfreindre le bon fonctionnement de l’entreprise.

Exemple de motifs professionnels 

L’insuffisance professionnelle, l’incompétence ou encore l’inaptitude sont des raisons pour lesquelles un employeur peut licencier un salarié, car celui-ci n’est plus apte à exercer ses fonctions de manière satisfaisante. Les tribunaux exigent en revanche des éléments objectifs qui démontrent les motifs invoqués, comme une insuffisance de résultats basée sur un dispositif d’évaluation professionnelle, et ce dans la limite d’objectifs raisonnables fixés par l’employeur.

Exemple de motifs disciplinaires

Attitude négligente, inexécution fautive de la prestation de travail, indiscipline caractérisée, concurrence déloyale, harcèlement, violences ou encore des agissements accomplis dans le but de nuire à l’entreprise (vol, sabotage, divulgation de secrets industriels) sont autant de motifs disciplinaires réels et sérieux sur lesquels un employeur peut fonder le licenciement d’un salarié.

Les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse

Un licenciement sans cause réelle et sérieuse est injustifié ou abusif. Des recours sont possibles devant le  conseil des prud’hommes compétent pour le salarié qui en est victime. Seule la nullité du licenciement permet d’exiger la réintégration du salarié. En l’absence de cause réelle et sérieuse au licenciement, le code du travail dispose que le juge peut proposer une réintégration du salarié dans l’entreprise, ou lui octroyer une indemnité à la charge de l’employeur sur le fondement du barème Macron.

Le cas particulier des salariés de direction ou de confiance

Malgré l’affirmation de la Cour de cassation selon laquelle la perte de confiance à elle seule est un reproche vague et subjectif, il peut être soutenu s’agissant des salariés de direction ou de confiance qui ont des responsabilités élevées que la faute commise puisse être suffisamment sérieuse au point où elle remet en cause la confiance indispensable à l’existence d’une relation contractuelle exécutée de bonne foi. Il se pourrait que dans certaines affaires, les juges puissent mettre en balance cette rupture de confiance dans le jugement et que cet élément vienne aggraver la faute disciplinaire. 

Quand la perte de confiance résulte de la faute disciplinaire : Cass. soc. 9 avril 2004 (13-14.129)

Il peut arriver que certains agissements de cadre de direction menacent le climat de confiance au sein d’une entreprise. 

C’était le cas notamment pour la directrice des ressources humaines qui avait été licenciée pour faute grave après avoir procédé à de fausses facturations à plusieurs reprises. La Cour de cassation a alors indiqué que cette situation avait conduit la société à “perdre toute confiance dans la salariée, alors même qu’une telle confiance est indispensable entre un employeur et un cadre de haut niveau compte tenu du degré d’autonomie qui lui est laissé.” L’employée a été licenciée sur ces faits de tromperie : la faute a été aggravée du fait de la rupture de la confiance perdue qu’elle a entraîné vis-à-vis des supérieurs hiérarchiques mais aussi des personnes sous sa responsabilité, ce qui rendait impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise.

Conclusion et retour sur les positions divergentes de la Cour de cassation et du Conseil d’état

Alors que le Conseil d’État a confirmé dans sa jurisprudence que la perte de confiance demeure un motif de licenciement pour les salariés protégés (Conseil d’Etat, 7e et 2e sous-sections réunies, 10 février 2014, n° 358992 : le motif de licenciement pour perte de confiance constitue, sous le contrôle du juge, un motif valable au sens des stipulations de l’article 24 de la charte sociale européenne) et ceux exerçant des fonctions à responsabilité, la Cour de cassation maintient quant à elle que le manque de confiance de l’employeur ne peut jamais justifier le licenciement à lui seul. 

L’enjeu à l’avenir est de construire un meilleur encadrement juridique à la notion de “perte de confiance” et d’assurer la protection du salarié contre le licenciement arbitraire.

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