a rupture conventionnelle est un mode de rupture amiable du contrat de travail. Elle est décidée d’un commun accord par l’employeur et le salarié. Ensemble, ils doivent s’entendre sur les modalités de sa mise en œuvre et sur ses conséquences financières. Dès lors, ni l’employeur, ni le salarié ne peut être contraint par l’autre : chaque partie demeure libre d’accepter ou de refuser le processus. A défaut d’accord, la rupture conventionnelle ne peut prospérer.
Dans ce contexte, un employeur peut-il entamer une procédure de licenciement si le salarié refuse une rupture conventionnelle ?
Mettre fin à un contrat de travail d’un commun accord grâce à la rupture conventionnelle
Un employeur ne peut, en aucun cas, imposer une rupture conventionnelle au salarié… tout comme le salarié ne peut forcer son employeur à engager cette procédure.
La rupture conventionnelle doit être envisagée d’un commun accord : il ne s’agit ni d’un licenciement, ni d’une démission, mais d’un départ négocié entre les parties. Elle est ouverte à tous les salariés employés en contrat à durée déterminée dans le secteur privée, y compris les salariés protégés (représentants du personnel, etc.)
La rupture conventionnelle présente des avantages :
- Pour le salarié : la rupture conventionnelle lui permet de bénéficier d’une indemnité spécifique de rupture conventionnelle (dont le montant ne peut être inférieur au montant de l’indemnité légale de licenciement ou de l’indemnité conventionnelle de licenciement si elle est plus favorable) et de prétendre aux allocations chômage (tout comme s’il avait été licencié) ;
- Pour l’employeur : la rupture conventionnelle lui permet de rompre une relation de travail de manière rapide et peu conflictuelle. Elle lui offre également la possibilité de limiter les risques de litige devant le conseil de Prud’hommes pour licenciement abusif.
Une démarche souple mais réglementée
Lorsqu’ils sont d’accord sur le principe de la rupture conventionnelle, employeur et salarié doivent se plier à la procédure que leur impose le Code du travail.
C’est à l’occasion d’un ou de plusieurs entretiens qu’ils sont tenus de discuter des modalités de la rupture. Au cours des entretiens, le salarié peut se faire assister d’un salarié de l’entreprise (représentant du personnel ou simple salarié) ou, en l’absence de représentant du personnel, d’un conseiller extérieur (liste consultable en mairie). L’accord trouvé doit être repris par écrit, dans une convention à remplir obligatoirement sur la plateforme dédiée (www.telerc.travail.gouv.fr). Le formulaire doit mentionner :
- Les conditions de la rupture ;
- Le montant de l’indemnisation ;
- La date de la rupture : au plus tôt, le lendemain du jour de l’homologation de la convention par l’administration.
Le formulaire doit être établi et signé en 3 originaux dont un exemplaire remis au salarié et un exemplaire pour l’employeur.
Une fois la convention signée, l’employeur et le salarié disposent de quinze jours calendaires (dimanches et jours fériés compris) pour exercer un droit de rétractation. Celui qui se rétracte n’est pas tenu de motiver sa décision.
A l’issue du délai de rétractation, si aucune partie ne s’est retirée, l’employeur ou le salarié adresse sur la plateforme dédiée www.telerc.travail.gouv.fr par voie dématérialisée un exemplaire de la convention à la DRIEETS (Direction régionale interdépartementale, de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités ex-Dirrecte), en vue de la faire homologuer.
Le contrat de travail est rompu de façon définitive à compter du lendemain du jour de l’homologation. Toutefois, l’accord peut être annulé si le salarié prouve que son consentement a été obtenu de manière illégale (sous la menace par exemple). Dans ce cas, la rupture pourra être requalifiée par le juge en licenciement sans cause réelle et sérieuse. La Cour de cassation a déjà plusieurs fois statué en ce sens.
Que peut faire un salarié face à un employeur qui refuse une rupture conventionnelle ?
Comme le salarié, l’employeur n’est jamais tenu d’accepter une rupture conventionnelle. Il peut ne pas avoir envie de se séparer du salarié dont il apprécie le travail ; considérer que si le salarié souhaite partir, il lui appartient de présenter sa démission ; estimer que le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle sollicité par le salarié est trop élevé ; etc.
Dès lors, puisque la rupture conventionnelle repose sur le consensus, il n’existe pas de recours possible contre un employeur qui la refuse. Le salarié concerné peut uniquement essayer de convaincre son employeur en mettant en avant, par exemple, les avantages qu’il aurait à procéder à une rupture conventionnelle plutôt qu’à garder en poste un salarié démotivé.
Si ces arguments ou la renégociation des conditions de la rupture conventionnelle ne suffisent pas à faire accepter la rupture conventionnelle à l’employeur, le salarié qui souhaite quitter l’entreprise n’a alors pas d’autre solution que de démissionner, prendre acte de la rupture ou solliciter la résiliation judiciaire.
Le choix de la démission
Contrairement à la rupture conventionnelle, la démission ne nécessite pas l’accord de l’employeur. Elle est présentée par le salarié qui souhaite quitter l’entreprise.
Toutefois, pour que sa démission soit valable, le salarié doit exprimer de façon claire sa volonté de mettre fin à son contrat de travail. Une absence injustifiée ou un abandon de poste ne peuvent pas être considérés comme une démission.
Par ailleurs, après avoir démissionné, le salarié reste tenu de travailler jusqu’à la fin de son contrat de travail. Il doit respecter le délai de préavis prévu (sauf en cas de dispense du préavis donnée par l’employeur).
Le choix de la prise d’acte ou de la résiliation judiciaire du contrat de travail
Si le salarié est en mesure de démontrer un manquement grave de l’employeur dans l’exécution du contrat de travail il peut rompre sans préavis le contrat aux torts de l’employeur. Saisi dans le cadre d’une procédure accélérée le juge sera amené à se prononcer sur le bien fondé de cette prise d’acte. S’il juge la prise d’acte fondée, le juge lui fera produire les effets d’un licenciement sans cause réelle ni sérieuse ou nul. S’il ne la juge pas fondée, la prise d’acte sera qualifiée en démission.
Le cas du licenciement après le refus d’une rupture conventionnelle
Un salarié qui refuse de signer une rupture conventionnelle ne peut en aucun cas être sanctionné pour cette raison par son employeur. Si l’employeur use de ce motif pour licencier le salarié, le licenciement pourra être qualifié d’abusif en justice. La nullité du licenciement pourra même être invoquée en cas de licenciement discriminatoire. Le salarié pourra également se prévaloir de la nullité du licenciement lorsque ce dernier fera suite à des agissements constitutifs de harcèlement. Cela peut être le cas lorsque l’employeur accompagne son invitation à une rupture conventionnelle de pressions, menaces et agissements répétés afin que le salarié signe le formulaire.
L’entreprise ne peut se tourner vers le licenciement que s’il existe des raisons légitimes de se séparer du salarié, c’est-à-dire :
- Si l’entreprise dispose d’un motif réel et sérieux parce que, par exemple, le salarié a commis une faute (retards répétés, refus d’obéir à un ordre hiérarchique, agression d’un collègue, détournement de fonds, etc.) ; fait preuve d’insuffisance professionnelle (manque de compétence, de motivation, etc.) ; que son inaptitude physique a été constatée par le médecin du travail ; etc.
- Si l’entreprise traverse des difficultés financières graves et se tourne vers le licenciement économique.
La procédure de licenciement relève de l’initiative et de la décision de l’employeur qui doit toutefois respecter les dispositions strictes que la loi lui impose (convocation à un entretien préalable de licenciement, notification du licenciement par lettre recommandée, etc.). Sauf faute grave ou lourde, le salarié a alors droit à un préavis et perçoit de son entreprise une indemnité de licenciement.