Qu’est-ce qu’une obligation de reclassement du salarié
Une entreprise qui connaît des difficultés économiques importantes, qui subit des mutations technologiques notables, qui rencontre une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou qui se trouve confrontée à la cessation de son activité peut recourir au licenciement pour motif économique. Toutefois, cette mesure ne doit être mise en œuvre que si aucune autre solution n’est envisageable. Il appartient en effet à l’employeur de rechercher toutes les réponses possibles pour éviter aux salariés de perdre leur emploi. A ce titre, l’employeur est tenu à une obligation de reclassement.
L’obligation de reclassement est prévue à l’article L. 1233-4 du Code du travail. Elle s’applique quel que soit l’effectif de l’entreprise ou le nombre de salariés visés par le licenciement économique. A noter toutefois que lorsque plus de dix salariés sont concernés par le licenciement pour motif économique et que l’entreprise compte plus de cinquante salariés, l’employeur doit mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi en consultant le Comité social et économique.
L’employeur qui envisage de procéder à un licenciement pour motif économique se doit ainsi de proposer au(x) salarié(s) concerné(s) les postes disponibles dans l’entreprise ou dans les autres entreprises du groupe situés sur le territoire national et dans lequel il existe une permutation du personnel. Les emplois offerts doivent relever de la même catégorie (ou correspondre à un emploi équivalent) avec une rémunération équivalente. Toutefois, l’employeur a la possibilité de soumettre, si le salarié est d’accord, des propositions de reclassement d’une catégorie et d’une rémunération inférieure.
Si le poste disponible nécessite une formation, l’employeur doit la proposer au salarié.
Outre l’obligation de reclassement, l’employeur devra également se soumettre à l’ensemble des obligations légales liées à un licenciement économique (cf notre article sur le licenciement économique).
Déroulement d’un reclassement dans le cadre d’un licenciement économique
Les propositions d’offres de reclassement doivent faire l’objet d’une démarche sérieuse de la part de l’employeur
L’employeur doit engager ses recherches de reclassement dès le début de la procédure de licenciement et adresser au(x) salarié(s) visé(s) par le licenciement économique des propositions de reclassement qui soient personnalisées et adaptées.
Les recherches doivent prioritairement portées sur les emplois disponibles au sein de l’entreprise (ou des sociétés du groupe) et situés sur le territoire national. Mais il est également possible de proposer des offres à l’étranger si le salarié en fait la demande.
Le salarié est libre d’accepter ou de refuser les offres de reclassement qui lui sont proposées par son employeur.
Si le salarié accepte une proposition de reclassement, il doit, dans les délais impartis, présenter par écrit sa candidature à son employeur. La procédure de licenciement pour motif économique est alors abandonnée et le contrat de travail du salarié se poursuit, après avoir fait l’objet, le cas échéant, des modifications nécessaires (en accord avec le salarié).
Si le salarié refuse toutes les propositions de reclassement et que l’employeur est arrivé au bout des solutions prévues par la loi, l’entreprise est en droit de procéder au licenciement pour motif économique.
Le refus de reclassement pour motif économique ne peut jamais être préjudiciable pour le salarié. Il ne saurait être « abusif ». A la différence du refus abusif de reclassement en matière d’inaptitude professionnelle qui peut :
- Priver le salarié de l’attribution d’indemnités spéciales d’inaptitude d’origine professionnelle ;
- Lui donner uniquement droit au bénéfice de l’indemnité légale de licenciement.
L’obligation de reclassement se distingue de la proposition de modification du contrat de travail pour motif économique ou de la demande de simple changement des conditions de travail laquelle peut être imposée au salarié même sans son accord.
A noter que l’obligation de reclassement pour motif économique se distingue encore de la priorité de réembauche.
Tout salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche pendant une durée d’un an à compter de la date de rupture de son contrat s’il en fait la demande dans ce délai. En cas de non-respect de cette obligation, l’employeur peut être condamné à des dommages et intérêts à hauteur de 2 mois de salaire.
Cette dernière obligation se situe après le licenciement ou la rupture du contrat de travail par adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle (CSP) alors que l’obligation de reclassement est préalable.
L’obligation d’adaptation
Si le salarié accepte une proposition de poste mais que ses compétences ne correspondent pas complètement à son nouvel emploi, l’employeur est tenu de lui proposer une formation complémentaire pour qu’il s’adapte à son nouveau poste. Le salarié est alors dans l’obligation de réaliser les efforts de formation d’adaptation qui lui sont proposés.
Si l’employeur ne respecte pas l’obligation d’adaptation, le salarié peut recevoir une indemnisation pour licenciement injustifié (licenciement sans cause réelle et sérieuse).
Comment un employeur doit-il formuler une offre de reclassement ?
Les offres de reclassement proposées aux salariés doivent être écrites et contenir notamment les informations suivantes :
- Intitulé et description du poste ;
- Nom de l’employeur ;
- Type de contrat de travail ;
- Localisation du poste ;
- Rémunération et classification ;
La proposition doit également préciser le délai (au moins 15 jours) dont dispose le salarié pour candidater au poste de reclassement qui l’intéresse.
Les offres de reclassement peuvent être individualisées ou une liste de poste peut aussi être diffusée.
L’employeur devra préciser les critères de départage en cas de candidatures multiples à un même poste dans le cadre d’un licenciement économique collectif.
Obligations de l’employeur et recours judiciaire pour le salarié
En cas de non-respect de l’obligation de reclassement par l’employeur, le salarié peut demander (dans le cadre d’une procédure contentieuse) des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L’employeur a une obligation de moyen renforcée : ce sera à lui de prouver qu’il a effectué toutes les recherches possibles et que le reclassement était impossible.
La demande de production du registre du personnel (entrées et sorties), la recherche des offres d’emploi publiées sur internet constitueront des aides précieuses pour démontrer ou invalider la matérialité de la recherche de reclassement. Le délai de contestation du licenciement économique est d’un an à compter de la rupture (date de notification du licenciement ou date de rupture résultant du CSP).
Suffisamment en amont, le recours aux conseils d’un avocat en droit du travail pourra être très utile.